Biodiversité

De nouvelles avancées dans la lutte contre les maladies du riz et du manioc

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Des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires au Bénin, au Burkina Faso et en Cote d’Ivoire ont décrit pour la première fois de nouvelles maladies du riz et du manioc, deux cultures alimentaires de base dans de nombreux pays du Sud. Ces maladies sont dues à des bactéries du genre Xanthomonas, qui attaquent feuilles et tiges et se propagent en Afrique de l’Ouest avec l’expansion et l’intensification des cultures.

Une maladie émergente due à l’intensification de la riziculture

Chez le riz, cette maladie bactérienne, aussi appelée « bactériose foliaire», est l’une des plus graves affections de la plante. Elle est présente dans la plupart des régions rizicoles du monde, à l’exception du bassin méditerranéen, et entraîne des dégâts considérables, jusqu’à 30 % de perte des rendements. Elle a été rapportée pour la première fois en Afrique dans les années 1980, à Madagascar, au Sénégal et au Nigeria. Depuis peu, les scientifiques observent son émergence en Afrique de l’Ouest, suite à l’expansion de la culture du riz et à l’introduction de variétés à haut rendement au cours des dernières décennies. La riziculture a en effet grandement augmenté au cours des années 2000 en Afrique de l’Ouest. Cette intensification accroit le risque d’émergence de pathogènes.
La bactérie est désormais présente dans la plupart des régions, en particulier au Mali et au Burkina Faso où les chercheurs l’ont caractérisé. La maladie vient également d’être rapportée dans le Nord du Bénin. De plus amples investigations doivent être menées pour déterminer l’importance de sa propagation dans ces pays.

Des souches très diversifiées génétiquement

Les analyses génétiques des souches de Xanthomonas collectées au Mali et au Burkina Faso ont montré qu’elles sont très diversifiées. Ces souches africaines auraient pour ancêtre soit une souche asiatique importée, soit une souche africaine ancienne. De plus, leur évolution génétique est très rapide.
Les chercheurs ont également montré que la sévérité des symptômes varie grandement d’une souche à l’autre, indépendamment du lieu, de la période ou de la nature de la plante sur laquelle les chercheurs les ont collectées. Ce résultat suggère que des souches faiblement virulentes cohabitent avec des souches très virulentes dans les mêmes environnements.
Enfin, les scientifiques ont observé la bactérie sur différentes plantes hôtes, comme cela avait été précédemment décrit en Asie. Outre chez le riz cultivé, ils l’ont en effet découverte chez de mauvaises herbes et des graminées vivaces, ainsi que chez des variétés de riz sauvage. Ces plantes constituent ainsi un réservoir naturel de la maladie en dehors des périodes de culture.

La maladie confirmée chez le manioc en Côte d’Ivoire

Chez le manioc, la maladie due à la bactérie du genre Xanthomonas, appelée « bactériose vasculaire », est quant à elle apparue au début du siècle dernier au Brésil et a suivi l’extension de la culture du manioc dans le monde – aujourd’hui au 6e rang mondial des plantes alimentaires, plus de 700 millions de personnes en dépendent pour leur sécurité alimentaire. Il s’agit de l’affection qui cause le plus de pertes touchant notamment le matériel de propagation qu’est la tige , pouvant atteindre également 30 % des récoltes. Sa présence vient d’être confirmée par des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires au Burkina-Faso et en Côte d’Ivoire où elle avait été rapportée en 1979. Depuis, aucune étude n’y avait été consacrée pour caractériser le pathogène responsable. Les chercheurs confirment par de nouvelles méthodes génétiques qu’il s’agit bien d’une bactérie du genre Xanthomonas. Ce résultat est préoccupant, dans la mesure où la culture du manioc poursuit son expansion dans différentes régions du pays et au-delà dans la sous-région.

Etant donné l’extension et la sévérité des épidémies de bactériose ces dernières années en Afrique, développer des variétés de riz et de manioc résistantes à ces maladies est d’une grande importance. Les chercheurs ont identifié certaines variétés de riz résistantes, cultivées au Burkina Faso, ainsi que le gène qui confère cette capacité à la plante. Ces résultats permettront d’orienter les schémas de sélection de ces variétés d’intérêt, pour améliorer la sécurité alimentaire dans les pays touchés.